"Je Sais que Vous Mentez", les clés pour devenir un meilleur détecteur de mensonge, par Paul Ekman

Ce thème peut sembler éloigné du marketing et des neurosciences. Cependant, Paul Ekman, célèbre psychologue américain, connu pour ces travaux dans le domaine de la reconnaissance des émotions et du mensonge, a apporté sa contribution au vaste domaine du neuromarketing. La mise en lumière des 6 émotions universelles, son travail sur la reconnaissance des microexpressions et leurs potentielles significations ou  l’étude des comportement qui peuvent trahir un menteur, voilà des travaux qui ont permis de contribuer à la compréhension du comportement des consommateurs.

Dans son livre « Je Sais que Vous Mentez », Ekman explore l’univers complexe du mensonge, en s’appuyant sur des décennies de recherches en psychologie, expression faciale et analyse comportementale. Nous allons passer en revue les principaux points et concepts clé à retenir de son livre;

1. Tous les mensonges ne se valent pas

Mentir ne consiste pas uniquement à inventer une histoire. Il y a plusieurs formes de mensonge : l’omission (ne pas dire toute la vérité), la dissimulation (cacher un élément clé), et la falsification (invention pure). Ces distinctions sont importantes, car elles impliquent des niveaux de complexité et de détection très différents.

🔍 Exemple : Un consultant freelance affirme avoir « travaillé avec des entreprises du CAC 40 ». En réalité, il a simplement été prestataire d’un sous-traitant. Il n’a pas menti au sens strict, mais il a intentionnellement donné une image déformée de la réalité.

🎯 En marketing : Ce type de communication floue peut séduire à court terme, mais il fragilise la confiance. Et dans un monde saturé d’informations, la confiance est la monnaie la plus précieuse.

2. Le mensonge implique une intention délibérée de tromper

Un point essentiel : un mensonge n’est pas simplement une erreur ou une inexactitude. Ce qui le caractérise, c’est l’intention de tromper. C’est cette dimension éthique et consciente qui distingue le mensonge de la simple maladresse.

🔍 Exemple : Un professionnel du web republie un ancien témoignage client en le présentant comme « tout récent » pour séduire de nouveaux prospects. Ce n’est pas une erreur d’inattention : c’est une stratégie volontairement trompeuse.

🎯 À méditer : Toute communication qui vise à manipuler la perception sans fondement réel s’apparente à une forme de mensonge. La transparence devient alors un acte marketing fort.

3. Les émotions ne se cachent pas si facilement

Même quand nous tentons de dissimuler une émotion, celle-ci peut fuir à travers nos gestes, notre ton de voix, ou surtout notre visage. Ce que nous ressentons profondément finit par transparaître, parfois à notre insu. C’est là que le corps « parle malgré nous ».

🔍 Exemple : Lors d’un call Zoom, un freelance assure que tout va bien sur le projet, mais ses sourcils se froncent légèrement au moment de parler des délais. Ce micro-changement, imperceptible pour beaucoup, peut être un indice d’inquiétude qu’il essaie de cacher.

🎯 En communication : En captant ces signaux faibles, on devient plus apte à détecter les désalignements entre le discours et la réalité. Cela permet d’adapter sa communication en temps réel.

4. Les micro-expressions sont les empreintes digitales des émotions

Une micro-expression est une expression faciale qui dure moins d’une demi-seconde. Elle apparaît avant que le cerveau ne reprenne le contrôle. Ces micro-indices émotionnels sont universels (présents dans toutes les cultures) et presque impossibles à inhiber.

🔍 Exemple : Un client examine votre devis. Il sourit poliment, mais une micro-expression de rejet (lèvre supérieure retroussée, léger rictus de mépris) s’affiche un instant. Il ne dit rien, mais ce signal non verbal suggère qu’il trouve le tarif exagéré.

🎯 En communication : En affinant notre capacité à repérer ces micro-expressions, on peut mieux décoder les réactions réelles de notre interlocuteur – au-delà de ses mots.

5. Mentir mobilise plus d’énergie mentale

Le mensonge est cognitivement coûteux : il faut inventer une version crédible, se souvenir de ce qu’on a dit, gérer son langage corporel et contrôler ses émotions. Ce surplus d’activité mentale peut générer des incohérences, des hésitations ou des comportements inhabituels.

🔍 Exemple : Lors d’un entretien, un candidat prétend avoir mené une campagne virale. Il cherche ses mots, évite les détails concrets, et donne une version floue. Le manque de spontanéité et de précision est révélateur.

🎯 Dans le business : Une communication authentique est fluide, naturelle. Une histoire trop bien ficelée, sans aspérités, peut parfois être un signal d’alarme.

6. Stress ≠ mensonge

C’est un point fondamental : une personne stressée n’est pas forcément en train de mentir. Le stress peut venir de l’anxiété, du jugement social, de l’introversion. Il faut donc éviter de tirer des conclusions hâtives basées uniquement sur des comportements nerveux.

🔍 Exemple : Un fondateur de startup transpire abondamment pendant un pitch. Il bafouille, regarde ses fiches. Ce n’est pas un menteur : il est juste peu habitué à parler en public.

🎯 Le piège : Prendre le stress pour un signe de mensonge est une erreur classique. Ekman insiste sur l’importance de combiner plusieurs indices avant de poser un jugement.

7. Certaines émotions sont plus faciles à jouer que d’autres

Le sourire social est facile à imiter. En revanche, des émotions comme la peur, la colère ou le dégoût impliquent des groupes musculaires involontaires et sont donc beaucoup plus difficiles à simuler.

🔍 Exemple : Un commercial dit être ravi de signer un contrat, mais son sourire ne touche pas ses yeux : pas de ride de la patte d’oie, pas de plissement sincère. Il s’agit d’un sourire factice, sans émotion réelle derrière.

🎯 En marketing: Une vidéo avec un sourire non authentique peut générer une gêne chez l’audience, même sans qu’elle sache pourquoi. Le cerveau humain est câblé pour capter l’authenticité.

8. Plus l’enjeu émotionnel est fort, plus les fuites sont probables

Quand la pression augmente (enjeu personnel, stress, peur d’être démasqué), le menteur est plus susceptible de laisser échapper des signes. L’émotion prend le dessus sur le contrôle rationnel.

🔍 Exemple : Un freelance sous-traitant découvre un problème technique majeur avant livraison. En réunion, il assure que tout est « géré », mais sa respiration s’accélère, il cligne des yeux plus fréquemment – des signes physiologiques d’alerte.

🎯 Ce qu’il faut retenir : C’est dans les situations à haute intensité émotionnelle que les fuites sont les plus visibles – si on sait les repérer.

9. Les indices ne sont pas uniquement visuels

Le mensonge s’entend aussi dans la voix (intonation, débit, silences), dans les mots employés (langage flou, contradiction), ou dans les gestes (auto-contacts, agitation des mains). L’analyse du mensonge est multidimensionnelle.

🔍 Exemple : Un client dit « je suis sûr que ça ira », mais son ton monte à la fin de la phrase, comme s’il posait une question. Son débit ralentit. Cela peut trahir un doute non exprimé.

🎯 En entretien ou prospection : Prêter attention au rythme de parole, aux silences ou aux formulations (« je pense que… », « peut-être que… ») peut fournir des informations précieuses.

10. Plus on connaît quelqu’un, plus il est difficile de croire qu’il ment

Les relations de confiance peuvent aveugler. On accorde plus de crédibilité à ceux que l’on apprécie ou côtoie régulièrement. Pourtant, les personnes les plus proches peuvent elles aussi mentir – parfois même plus habilement.

🔍 Exemple : Un associé de longue date affirme avoir rempli sa part du travail. Vous le croyez sur parole… mais découvrez qu’il a pris du retard sans rien dire. Votre biais de confiance a brouillé votre vigilance.

🎯 Le piège : Croire que seuls les inconnus mentent est une erreur fréquente. Ekman démontre que l’intimité n’est pas un filtre fiable pour détecter le mensonge.

En conclusion : Pourquoi est-ce si précieux dans notre métier ?

Comprendre les mécanismes du mensonge, c’est développer une écoute plus fine, une lecture plus précise des signaux faibles, et une capacité à ajuster son discours pour créer des relations plus sincères. C’est aussi un levier de différenciation pour toute personne travaillant dans la communication, la vente ou le marketing.

Dans un monde saturé de discours trop bien calibrés, l’authenticité est la clé.

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